Une très brillante soirée a marqué, le 15 octobre dernier au Collège des Bernardins, la remise du prix 2015 de l’AJCF à Richard Prasquier, ancien Président du CRIF. Une soirée où on a pu entendre, fraternellement réunies, des voix juives et chrétiennes dire leur reconnaissance pour l’œuvre de rapprochement menée depuis des décennies par un fils de survivants de la Shoah, juifs polonais venus en France après la Guerre.
J’ai eu le privilège d’assister à cet évènement, particulièrement ému de voir ainsi honoré mon ancien « patron » au CRIF, qui m’avait accordé sa confiance en me confiant l’animation d’une commission dédiée à un autre dialogue, hélas encore bien difficile, celui là avec les Musulmans.
La vie de Richard Prasquier est en elle-même une sorte de roman, tant elle a été riche et variée. Enfants de survivants de la Shoah, dont la famille fut cachée par une famille polonaise catholique – ce qui était particulièrement courageux et exceptionnel à ce moment là -, il est venu vivre avec sa famille en France dès les lendemains de la Guerre, alors que tout était à reconstruire, à la fois pour les survivants de tant de familles décimées, et pour la communauté juive dans son ensemble. Il avoue bien volontiers n’avoir pas été élevé dans une atmosphère religieuse, la foi ayant été perdue après un tel désastre. Et pourtant, il a su très rapidement réaliser l’importance des racines spirituelles communes aux Juifs et aux Chrétiens, et il a su œuvrer – une fois devenu responsable des plus importantes institutions juives de France – pour transformer la fin « de l’enseignement du mépris », consacré par Nostra Aetate, en une réelle amitié. Un autre destin devait croiser le sien, celui de Monsieur Lustiger, juif polonais de naissance comme lui, et qui devait aussi incarner par son extraordinaire parcours les retrouvailles entre Juifs et Chrétiens. Richard Prasquier a tenu à ce que sa mémoire soit honorée par un Mémorial en Israël, plus précisément dans le Monastère d’Abou Gosh – représenté à la table d’honneur un Père Abbé venu spécialement pour la soirée -, soirée où on devait également présenter le film de son inauguration en 2013. Mais cette fraternité humaine, cette amitié si largement donnée à tant de personnalités différentes, elle devait aussi se décliner de bien d’autres façons : par son dévouement comme médecin, cardiologue ; par sa curiosité inépuisable et sa soif de lectures sur tous les sujets ; par son action à la tête du Comité Français du Yad Vashem, et les honneurs rendus aux « Justes » qui sauvèrent des milliers de Juifs sous l’Occupation ; et enfin par son travail infatigable à la tête du CRIF, en des temps difficiles où il fallait à la fois défendre une communauté revivant une période sombre d’agressions, et un État d’Israël souvent mal compris par les médias ou les politiques.
L’Amitié Judéo-Chrétienne de France a publié sur son site une page très riche, où on trouvera l’ensemble des allocutions prononcées lors de cette soirée, un diaporama ainsi qu’une vidéo.
Ont pris la parole où on fait lire leur message successivement, Jacqueline Cuche, Présidente de l’AJCF ; Mgr Beau, Évêque auxiliaire de Paris et Président du Collège des Bernardins ; Mgr Jordy, Évêque de Saint-Claude et Président du Conseil pour l’Unité des Chrétiens et les relations avec le Judaïsme ; Haïm Korsia, Grand Rabbin de France ; le Cardinal Vingt-Trois, Archevêque de Paris ; le Cardinal Barbarin, Archevêque de Lyon ; Stéphanie Dassa, directrice de projet au CRIF et « cheville ouvrière » de la commission pour les relations avec les Églises Chrétiennes ; Michaël Azoulay, Rabbin de Neuilly-sur-Seine ; le Père Patrick Desbois, et le Père Abbé Charles Galichet, du Monastère d’Abou Gosh.
Le lien donné ci-dessus permet donc de prendre connaissance de toutes ces allocutions.
Pour le lecteur pressé, je recommanderais simplement de visionner le discours émouvant du Père Patrick Desbois, ami proche de Richard Prasquier et dont le chemin, aussi, ne pouvait que croiser le sien : Directeur du Service national des Évêques de France pour les relations avec le Judaïsme, il est surtout connu pour ses recherches, sur le terrain, de la « Shoah par balles » en Ukraine ; un témoin et un surtout un ami depuis 20 ans de l’ancien Président du CRIF.
Richard Prasquier devait répondre à tous ces éloges par un long et beau discours, dont on trouvera le texte intégral sur ce document.
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